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21 août 2011 7 21 /08 /août /2011 11:15

 

Sur le quai il reste une place assise

A côté d’une personne tout de suite identifiée comme SDF, sans abri, sans lien avec nous les gens normaux.

Elle est seule à parler. Les gens normaux ne parlent pas à voix haute sur les quais de métro. Je la regarde du clin de l’oeil, pour ne pas la gêner. En fait c’est nous qui sommes gênés, nous, les gens normaux. On n’est pas fier d’avoir fait ce qu’il fallait pour ne pas se trouver dans sa situation.

 

Elle parETE-2009.jpg

 le : « L’Amour... Ce monde est beau »

L’intonation est de théatre. J’imagine Sarah Bernard, déchue, tombée dans le ruisseau comme on disait à l’époque.

La Dame...(est-ce bien une femme d’ailleurs? Difficile  à dire avec ce crane rasé et la peau noircie.) sort de son sac une boite de crême Mont-blanc.. D’un geste net elle enlève le couvercle, le courbe en deux et s’en sert en guise de cuiller pour attaquer la crême au chocolat.

Tout ce qu’elle possède est là, à ses pieds dans 2 grands sacs IKEA pleins à craquer. D’ailleurs ils craquent.

« Vous leur fîtes, Seigneur, en les croquant, beaucoup d’honneur »

Ce discours, deux fois de suite, n’avait rien de banal. C’était bien Sarah Bernard. Ma journée ne commençait pas bien pour autant.

Evidemment, je suis montée dans la rame du métro en trainant ma mauvaise conscience, lourde comme 2 sacs Ikea pleins à craquer.

Elle est restée sur le quai à manger sa crême au chocolat qu’elle n’avait même pas l’air d’apprécier.

Dans le métro, une autre voix, féminine, sans accent : « J’ai faim » C’était bien ma journée. Je décide que je ne resterai plus jamais inerte devant une femme dans la dèche. Celle-ci est admirable de concision. « J’ai faim » en 2 mots tout est dit.

Bon, évidemment, si on détaille un peu on remarque un sac en croco et des boots en vrai cuir. C’est égal, je donnerai des sous à toutes celles qui diront « j’ai faim » Quel courage faut-il  pour arriver à dire ces mots à des gens qui ne les entendent pas.

Plus loin, avenue Victoria, une rue tranquille à côté du Chatelet, une antillaise est assise à même le trottoir sur du plastique. Je ressors une pièce. « Foutez-moi la paix » Je dis que je mets la pièce par terre à côté d’elle. Elle me montre le caniveau « votre truc je le mets direct dans le trou » Je repars avec ma pièce, un peu cra-cra. Dommage j’aurais aimé lui parler.

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commentaires

M
<br /> <br /> Merci pour ce joli texte.Nous avons apprécié une fois de plus votre plume aussi légère que pointue là où on s'y attendrait le moins... <br /> <br /> <br /> <br />
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